Splitscreen-review Image de The Substance de Coralie Fargeat

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The Substance

Publié par - 29 mai 2024

Catégorie(s): Cinéma, Critiques, Expositions / Festivals

Avec son second long-métrage, The Substance, Coralie Fargeat surprendra le spectateur grâce à une dramaturgie extrêmement soignée. Le film a d’ailleurs obtenu à Cannes le prix du meilleur scénario. La séquence d'ouverture du film pose les enjeux du récit, c’est-à-dire comment fonctionne la substance du titre : la substance est injectée dans un œuf cassé et un nouvel œuf – bien plus frais – en ressort. Le même principe est appliqué alors aux humains dans une expérience.

L'actrice Elizabeth Sparkle (Demi Moore, dans une performance étonnante et audacieuse) fut par le passé une star de cinéma. Aujourd’hui, le public a presque oublié cette période comme en témoigne l’étoile négligée de l’actrice inscrite dans le pavé d’Hollywood Boulevard. Désormais, Elizabeth Sparkle présente un show d'aérobics à la TV. Quand elle célèbre son 50-ieme anniversaire, son producteur se débarrasse d’elle et cherche une nouvelle présentatrice plus jeune. En rentrant à la maison, Liz a un accident. Dans la salle d'urgence elle est identifiée comme une candidate pour « l'expérience ». Elle reçoit une offre d'utilisation de la substance qu’elle accepte : pendant une semaine, elle devient sa plus jeune réincarnation Sue (joué par Margaret Qualley, fille d'Andie MacDowell) et pendant une semaine, elle est son vieux moi.

Bien que les corps soient différents, le personnage reste le même. Mais un déséquilibre se fait jour :  la jeune Sue devient une star et prend plus de temps que la semaine qui lui était promise afin de profiter de son succès. Chaque jour supplémentaire qu'elle prend retranche des années de vie à Liz qui devient rapidement fragilisée parce que Sue « mange » son corps.

Splitscreen-review Image de The Substance de Coralie Fargeat

Le « body horror » se matérialise par l'émergence, à partir de la colonne vertébrale, du jeune soi. Puis dans la phase d’émergence d'un monstre quand la réplique Sue essaie de copier sa personnalité originelle pour devenir un nouvel être, plus jeune et plus parfait. Comme toujours, la figure du monstre métaphorise un discours. Ici, le monstre parodie les valeurs et les attentes des producteurs, des médias et du public.

Le film de Fargeat vise directement le système de production hollywoodien qui s'appuient sur l’effet que les corps jeunes et sexy ont sur le public et les cadres (masculins majoritairement). The Substance joue aussi avec les clichés du « stardom » (l'obsession de Liz pour son apparence ; le jugement de son ancien camarade d'école, etc.) et de la beauté (le tournage du film s’arrête quand le corps de Sue gonfle, le voisin de Sue change de visage lorsqu’il se plaint du bruit…).

The Substance est très certainement et avant tout un film qui sape la représentation des femmes à l'écran (« féministe ») alors que la dimension « body horror » du film se limite au déplacement d’un corps à un autre et au monstre né de la copie plutôt que de la matrice. Dans l'ensemble, c'est une représentation drôle et ironique de la production médiatique dominée par ce qu'elle tente de rejeter : un regard dominé par les hommes sur le corps féminin. Un film qui devrait convenir à Laura Mulvey !

Crédit photographique : Copyright Working Title / Copyright Metropolitan FilmExport /

 

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