Accueil > Expositions / Festivals > Hall 4 Fagor
La singularité du paysage donné à voir dans le fond du hall 1 de l’usine Fagor par les quatre artistes, Dale Harding et Chou Yu-Cheng pour l’arrière-plan, Léonard Martin pour le deuxième plan et Simphiwe Ndzube pour le premier, tient à la nécessité de se déplacer. À longer trois îlots qui constituent les installations de l’artiste sud africain, soit In the Land of the Blind, The One Eyed is King? et Journey to Asazi. Une installation qu’on ne peut pas traverser à sa guise, contrairement à celle de Léonard Martin, maintenus que nous sommes à faible distance, mais à distance quand même. Pour observer des points de vue singuliers sur des paysages, il faudra se rendre dans le hall 4, le dernier, pour redonner pleinement sens au titre de la Biennale : Là où les eaux se mêlent. Entre-temps, les halls 2 et 3 forment comme une gradation, ils nous ramènent à des points de vue plus classiques.
Dans le hall 2, l’obscurité volontairement créée par les curateurs coupe le volume, ramène notre point de vue à hauteur des yeux. Il n’y a plus cet immense vide de l’entrée du hall 1. La lecture des œuvres se fait de manière linéaire, les œuvres les unes après les autres. C’est une lecture unitaire. Un point de vue, une œuvre, un paysage. Pamela Rosenkranz dans Evian Waters répand au sol de la poudre de maquillage rose qui forme un grand disque. Cette poudre est arrosée chaque jour à l’aide d’une bouteille d’eau, des reliefs disgracieux apparaissent alors. L’idéal de la beauté représentée ici par le maquillage est dégradé par une société consumériste qui ne parvient plus à réfréner ses addictions. Le thème est fort et pourtant il ne fait pas écho. Le hall 2 donne l’impression d’un grand tableau médiéval où des scènes se retrouvent pour la plupart côte à côte sans être liées, sans dialogue.
Dans le hall 3, qui est divisé en deux parties par une cloison, on retrouve la hauteur de plafond du hall 1 mais avec une surface bien moindre. La partie gauche expose deux œuvres. Celle de Sam Keogh, Knotworm (Sac de nœuds) et celle de Holly Hendry, Deep Soil Thrombossis, qui traitent de transformation et de destruction. Le déplacement entre les deux œuvres confirme la première impression de brutalité quand on arrive dans la salle, du fait même de la taille colossale de la tête foreuse du tunnelier au premier plan. Les deux installations s’opposent et se complètent. La monumentalité de la première confrontée à la sophistication des courbures des tuyaux d’aération de la seconde. L’omniprésence de rouille, cette rugosité confrontée à l’aspect si raffiné de l’inox, n’empêche pas pour la première que des végétaux comme la renouée du Japon se développent et que les tuyaux du second dégueulent des déchets, certes rosés et bleutés, mais quand même des déchets. C’est une lecture binaire qui se fait, sur deux plans verticaux. Ici les eaux font un va-et-vient. Pour qu’elles se mêlent, il faudra occuper tout le volume, ce qui constitue la singularité du dernier hall.
D’abord déambuler parmi les quatre principales installations au sol. L’œuvre de Menghzi Zheng intitulée Là où les vents se caressent n’est pas qu’un simple clin d’œil au titre de la Biennale. C’est une installation "spiralaire" en trois parties. Elle est faite de courbes et de cercles en bois, des attaches plastiques blanches maintenant la structure au sol grâce à des montants en bois. Quelques plaques colorées de plexiglas sont fixées sur la partie centrale. L’artiste ne veut pas traiter du vide mais des volumes qu’il suggère grâce à ces courbes comme s’il s’agissait d’une ossature, d’un chemin à suivre. On ne peut pas entrer dans l’installation, contrairement à celle de Pannaphan Yodmanee, intitulée Quarterly Myth. Deux séries d’énormes tuyaux en ciment utilisés pour l’assainissement sont décorés à l’intérieur de sculptures en bas relief et de fresques qui représentent des thèmes iconiques des civilisations asiatiques et occidentales : épisodes de la vie de Bouddha ou scènes bibliques comme la Création d’Adam de Michel-Ange.
Ce sont des fragments voire des éclats, souvent dégradés, qui s’offrent au regard du visiteur interloqué et transformé pour l’occasion en archéologue. À la sortie du tuyau une immense montgolfière de Taus Makhacheva intitulée Aerostatic experience voisine avec une installation qui occupe tout le fond du hall. Il s’agit de Shkrepëtima (Eclair) de Petrit Halilaj, un artiste kosovar qui a dû fuir enfant avec ses parents sa ville natale en proie à la guerre après la fin du communisme. Une vidéo montre une pièce de théâtre jouée près de sa ville. Les objets et accessoires ayant servi au spectacle sont présentés autour, rideau de scène ou habits de comédiens. Un lit est exposé sur une estrade d’où partent des matériaux de bâtiment comme des planches, des bouts de tuile ou des pierres maintenus sur des fils de fer.
L’originalité du point de vue du hall 4 réside dans l’installation de Yona Lee, In Transit (Highway). Il faut monter un escalier en colimaçon à une dizaine de mètres de haut. Le lieu est surprenant. Froid au premier abord avec toute sa tubulure en inox qui habille littéralement une surface longue et rectangulaire, un plancher en bois clair reposant sur l’une des structures porteuses de la charpente du hall. C’est comme un intérieur que l’artiste aurait décidé d’épurer en ne retenant que l’essentiel, un porte-cintres, un banc, deux lits superposés et leur matelas, un parapluie ouvert, un pan de rideau, des plantes en pot, deux tables rondes de jardin et leurs chaises. On peut donc s’asseoir. Le juste vital avec une touche incongrue, un bouton rouge fixé à un montant, un bouton d’appel qu’on trouve dans les bus. Alors on se dit que rien n’interdit de sortir de chez soi. Il y a même une lampe allumée. L’essentiel et c’est épuré, les mobiliers les uns après les autres. Une fois assis, sur l’une des chaises, on peut faire varier son point de vue et à un moment on se fixe et on regarde avec attention. Un équilibre visuel s’établit entre les matériaux utilisés par l’artiste, inox et bois. Toute cette tubulure au-dessus de notre tête et sur les extérieurs qui protègent. On ne craint rien. Pour peu, on domine. Presque omniscient. Une invitation à voyager, un voyage intérieur. Quelque chose nous est donné à voir sur les côtés. À gauche, les deux séries de cylindres en ciment forment un L discontinu. On ne se soucie plus des visiteurs qui entrent ou qui sortent. Un tronc d’arbre est suspendu juste au-dessus d’un tuyau. Je me souviens alors du végétal et de la présence de mousse sur les jointures. Deux plaques de ciment de forme circulaire comme découpées dans l’épaisseur des cylindres laissent apparaître pour l’un deux une béance et je revois une armature en fer qui sert à en renforcer la structure. Même les objets sont fragiles et, a fortiori, les hommes avec leur culture. Deux pierres au sol, brunies, marquent l’entrée et la sortie de l’installation. À ma droite, c’est plus simple, limpide avec la structure en bois et en plastique formant des spirales. En mémoire la clarté du bois utilisé, surtout sans aucune aspérité, aucun nœud, c’est lisse. Tout concourt à ce que le regard suive ces spirales jusqu’au bout et recommence.
D’en haut, de ce point de vue et pas ailleurs, deux fragilités représentées. L’une, la temporelle, la fragilité des civilisations, les traces qu’elles laissent, et l’amnésie qui guette chez Pannaphan Yodmanee. L’autre chez Menghzi Zheng, l’intemporelle, la cyclique comme un recommencement, une réelle obstination. De ce côté-là de l’habitacle tout est donc silencieux. Mais en arrière, en se retournant comme du gros bruit, des stridences chez Petrit Halilaj, avec tous ces fils de fer tendus dans les airs qui arrachent et dressent des objets depuis un lit. Quand les traumatismes réapparaissent.
Ce calme et ce bruit en tête. Tout ça en même temps. Alors toutes ces eaux qui se mélangent.
Plein tarif : 16€
Pack Entrée + visite ou audioguide : à partir de 17€
Billet-Brunch* : Entrée + Brunch du dimanche aux Usines Fagor : 30€ | 26€ (Pour les moins de 26 ans)
*Tarif spécial accessible uniquement en prévente en ligne ou au 04 27 46 65 65 (du mar. au dim. de 10h à 15h).
Tarif Réduit : 9€
Pack Entrée + visite ou audioguide : à partir de 13€
Sur présentation d’un justificatif : Moins de 26 ans, demandeurs d’emploi, carte famille nombreuse, enseignants et professeurs des écoles, professeurs en école des beaux-arts et d’architecture, accompagnateurs de PSH, professionnels du secteur culturel, les soirs de nocturne à partir de 18h.
Gratuité
Sur présentation d’un justificatif : Moins de 15 ans, détenteurs du PASS’REGION, étudiants en formation diplômante de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, étudiants des écoles d’arts, d’arts appliqués, d’architecture suivant des cursus diplômant, bénéficiaires du RSA, carte MAPRA et maison des artistes, carte ICOM et IBA, LYON CITY CARD, personnes en situation de handicap.
Pass permanent illimité
Pass permanent nominatif qui permet un accès illimité aux Usines Fagor, au macLYON et à l’IAC, Villeurbanne du 18 sept. 2019 au 05 janv. 2020.
Pass simple : 25€
Pass duo : 40€ (Valable pour 2 personnes)
Pass jeune : 16€ (moins de 26 ans)