Trente ans après l’adaptation en téléfilms du best-seller de Stephen King, Ça (It) revient sur les écrans, au cinéma cette fois-ci. Attendu au tournant par les fans de l’écrivain, le film, produit par la Warner, est réalisé par Andy Muschietti, un habitué du genre (Mama).

Dans la petite ville de Derry, dans le Maine, une bande d’enfants va vivre un été pour le moins effrayant. Tout commence quelques mois auparavant, lorsqu’un petit garçon qui jouait sous la pluie disparaît, ne laissant qu’une flaque d’eau teintée de sang derrière lui. D’autres disparitions d’enfants vont suivre sans que les adultes ne réagissent. Les adultes sont par ailleurs les grands absents de ce film : leur présence à l’écran est moindre et leur apparition ne sert qu’à nourrir les peurs des enfants, soit en n’étant d’aucun secours, soit en représentant une menace.

L’enfance est au centre de la réflexion de Ça et l’intrigue se concentre sur un groupe de jeunes adolescents, auto-proclamé le club des losers. Chacun des protagonistes est en effet doté d’une « tare » qui en fait une cible potentielle, tout d’abord du groupe des brutes de l’école, puis ensuite de Ça, la bête métamorphe qui hante les égouts de la ville. On retrouve ainsi Bill (Jaeden Lieberher), le garçon sensible et efflanqué (dont le petit frère, Georgie, est le premier à disparaître), Ben (Jeremy Ray Taylor), le petit gros, Eddie (Jack Dylan Grazer), l’hypocondriaque à la mère dominatrice, Richie (Finn Wolfhard), le comique avec des lunettes en cul de bouteille, Stanley (Wyatt Oleff), le fils du rabbin (l’histoire se déroulant dans une petite ville des États-Unis dans les années 80, être Juif et faire partie d’une minorité n’est pas chose aisée), Mike (Chosen Jacobs), Noir d’autant plus ostracisé qu’il est scolarisé à domicile, et enfin Beverly (Sophia Lillis), la seule fille du groupe, dont le père n’est pas le dernier à avoir remarqué le développement de ses attributs féminins. Chacun des membres du groupe est ainsi le garant d’une peur qu’il ou elle va devoir affronter pour battre Ça, et, métaphoriquement, surmonter le cap difficile du passage à l’âge adulte et de la perte de l’innocence. Si le film se fait porteur d’une thématique, c’est bien celle-ci, les ados étant à cette période charnière où ils sont suffisamment jeunes pour avoir encore la capacité de voir le monstre (on découvrira que ce n’est pas le cas du père de Beverly), mais assez âgés pour être en mesure d’apprendre à se défendre. Stanley est par ailleurs à la veille de sa Bar-mitsva, rituel qui consacrera le début de sa vie d’homme.

Toutes les peurs qui habitent les jeunes protagonistes vont être matérialisées et exploitées par Ça, une entité malveillante qui semble se repaitre de l’horreur qu’elle inspire à ses victimes. L’être, dont on ne connaît pas la nature, est ainsi capable de se transformer à son gré, d’apparaître à un endroit et à un moment où sa victime est particulièrement vulnérable et d’épouser la forme de son pire cauchemar. À l’écran, Ça, interprété par Bill Skarsgård (Hemlock Grove), fait son apparition dès les dix premières minutes du film dans la scène emblématique (c’est certainement la plus connue aussi bien du livre que du téléfilm de 1986) de l’attaque de Georgie : caché dans une bouche d’égout, un clown au regard perçant entame une conversation avec le petit garçon dont le bateau en papier a été avalé par ledit égout. S’ensuit une conversation que tout spectateur averti aura du mal à ne pas qualifier de flirt pédophile, où le clown se présente sous le nom de Grippe-sous (Pennywise). Discussion qui aboutit à l’enlèvement sanglant de Georgie, qui suit la trace de son bateau et est englouti à son tour par les égouts. Grippe-sous refera son apparition dans chaque stituation cauchemardesque qu’il générera, lui donnant ainsi une forme reconnaissable.

Si la première séquence du film fonctionne bien, notamment parce qu’elle suit les procédés du conte et qu’il en émane une étrangeté presque poétique, le film se borne à n’être qu’une adaptation du livre, ce qui joue finalement en sa défaveur. La profusion des personnages, qui doivent, chacun leur tour, faire face à leur plus grande peur, génère une succession de scènes sans surprise qui empêche le film de trouver un rythme adapté. Pour pallier à cet effet monocorde, la réalisation s’appuie sur de nombreux jump scares, que l’on voit par ailleurs venir de loin. Bref, Ça s’inscrit dans le genre de l’horreur et ne dénature aucunement l’ambiance du livre, mais n’utilise pas de procédés novateurs ou véritablement en adéquation avec le message qu’il voudrait faire passer.

Créditi photographique : Copyright 2017 WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. AND RATPAC-DUNE ENTERTAINMENT LLC. ALL RIGHTS RESERVED / Brooke Palmer