Splitscreen-review Image de Wonderwoman de Patty Jenkins

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Wonderwoman

Publié par - 14 juin 2017

Catégorie(s): Cinéma, Critiques

Confier les rênes d’une énorme production de super-héros à un réalisateur ayant fait ses preuves en dehors de l’entertainement pur, l’industrie hollywoodienne ne l’avait plus fait depuis Nolan et sa trilogie Dark Knight. Warner et DC l’osent, et innovent en confiant pour la première fois la mise en scène non pas à un réalisateur, mais une réalisatrice (après le 1er Batman en 1966 et plus de 50 films du genre tout de même…). Au-delà de l’effet d’annonce « une femme dirige Wonderwoman », on retrouve  un  nom estimé à la baguette : Patty Jenkins. Réalisatrice qui doit sa réputation à  l’onde de choc provoquée en 2003  par le dérangeant Monster, film là aussi essentiellement féminin (si ce n’est féministe).

Parmi les influences revendiquées par Jenkins : Richard Donner et son Superman de 1978 mais également celui qui donna ses lettres de noblesse à DC au cinéma dans les années 2000 : Christopher Nolan. Non pas du côté de son Dark Knight qui mixait polar hard boiled et comics, mais bien de celui de Batman Begins et son appartenance marquée au matériau d’origine. Wonderwoman respecte, tout comme ses deux modèles, le monde duquel il provient : ses amazones sont aussi colorées que sérieuses, son héroïne et sa vision du monde assez naïve, sa violence période guerre des tranchées édulcorée. Entre le ton Marvel, qui brise régulièrement depuis deux-trois ans le 4ème mur et glisse de la pop-culture à tout va pour paraitre «cool » (Spiderman, Thor, Guardians of the Galaxy, Deadpool…), et le ton DC qui respecte des valeurs de personnages créés il y a près de 70 ans et assume son 1er degré, le débat s’enflamme souvent chez les passionnés de comics.

Et c’est précisément à eux que s’adresse Patty Jenkins dans son film. Mais indirectement par l’intermédiaire d’une mise en scène subtile du script de Allan Heinberg, scénariste TV mais surtout scénariste papier Marvel et DC. Wonderwoman, au-delà de sa photo clinquante et de ses scènes d’action au couteau, est également une métaphore du trentenaire/quarantenaire qui a grandi accompagné de super-héros comme modèle. Alors enfant,  l’héroïne adule des modèles guerriers qui enseignent  qu’il y a concrètement  le Bien et  le Mal. En grandissant, elle apprend que le monde se compose de nuances et que le Mal n’est qu’un concept et non une réalité tangible … On pourrait s’arrêter ici pour la morale , sauf qu’il est question  d’une adulte qui continue de fantasmer sur ces univers encore aujourd’hui. Ainsi, dans la dernière partie du film, l’héroïne se rend compte que OUI, le Mal existe bel et bien sur cette Terre. Jenkins nous renvoie donc à notre image d’adulte conscient du monde qui l’entoure, mais qui aime à se bercer d’illusion par le cinéma ou la lecture pour se persuader que le monde pourrait bien être celui que l’on croyait étant enfant.

Solide et intelligent socle que celui-ci, qui permet au film de libérer son potentiel fun et explosif sans prendre le spectateur pour un décérébré. D’autant plus lorsqu’un amérindien glisse au coin du feu un dialogue qui a fait bondir hors de leur gonds certains ultra-conservateurs américains. D’autant plus lorsque Gal Gadot (étonnante actrice israélienne qui incarne la super-héroïne) glisse des allusions subtiles à la bisexualité de son personnage. Prendre un pied pareil au cinéma sans se sentir insulté, voilà un vrai plaisir qui renvoie le cinéma à ce qu’il peut donner sur ces films fait pour tous : divertir et faire réfléchir.

Crédit photographique : Copyright Warner Bros. France

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