Splitscreen-review Image de French Connection de William Friedkin

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Journal de la Petite Lumière J8

Publié par - 23 octobre 2017

Catégorie(s): Cinéma, Expositions / Festivals

 

Dimanche 22 octobre 2017

C'est le dernier jour du festival. C'est un peu triste d'imaginer que ce qui fait la particularité de cette ville va redevenir, pour une année entière, un bout d'histoire auquel la plupart des gens ne pense plus trop. Quand le festival est en ville, tout semble vibrer d'une énergie incroyable. La ville et le septième art ne semblent faire qu'un. Le cinéma est dans l'air, ça respire le cinéma. Maintenant, le quotidien va reprendre. Et il y aura, dès demain, cette inexorable sensation de manque, de vide.

Pour le dernier jour, il fallait marquer le coup. Je me suis donc intéressé à un film criminel célèbre : French Connection. William Friedkin avait produit ce film juste avant l'Exorciste et il était intéressant de voir comment il avait procédé avec un genre aussi différent. D'autant que French Connection est apparemment considéré comme l'un des films les plus violents de son temps. Avant la projection, Laurent Tirard nous présente le film. Il nous le résume et déclare que l'on peut prolonger l'expérience avec La French de Cédric Jimenez qui serait la partie française d'une investigation dont nous allions voir la vision américaine.

Malgré cela, tout commence à Marseille, par une belle journée d'été. On accompagne un personnage dont on ignore tout et qui semble suivre un parcours on ne peut plus banal à première vue. Il mange sur les quais, achète son pain et parcours tranquillement les rues labyrinthiques de la ville. Mais soudain, lorsqu'il pousse une porte, un homme dans l'ombre lui tire dessus. Le vacarme du coup de feu brise complètement la tranquillité de la cité. Après quoi l'assassin s'en va de manière effrontément banale, en piquant nonchalamment un bout du pain sur le cadavre. L'idée fondamentale du film est exposée : derrière un quotidien en apparence paisible, au-delà des apparences, le mal rôde et commet impunément des atrocités. C'est la mafia qui gangrène impunément la ville, cachée et pourtant à la vue de tous. Tout comme les deux mafiosos qui négocient dans un night-club chic la nuit et tiennent une boutique le jour.

Mais Jimmy Doyle (Gene Hackman), policier aux méthodes brutales, sent bien que quelque chose se prépare. Il perçoit, dans les rues de New York, de petits éléments qui ne semblent pas liés. Mais son intuition fait le lien. Tout comme dans le bar où il fait une descente, il sait qu'en réunissant les indices, à l'image des drogues trouvées in situ, se dissimule un projet d'envergure. La tâche n'est pas facile. Tout au long du film, les conditions de travail (pénibles) des policiers sont exposées simplement : un gros plan sur des chaussures dans le froid glacial, un décor exigu ou répugnant qui sert d'abri lors d'une planque… On s'identifie aux hommes qui tentent de dévoiler les plans des trafiquants de drogues pour convaincre leur hiérarchie, malgré le manque de moyens, de sommeil et les risques. Que peuvent-ils faire face à un groupe organisé et œuvrant dans l'ombre avec bien plus de moyen qu'eux ? Alors que l'on voit le mafieux Alain Charnier manger dans un grand restaurant et savourer un café de grande qualité, de l'autre côté de la rue, Doyle jette avec dégout sa ration de café bas-de-gamme.

Le film s'inscrit dans une approche réaliste du quotidien du policier dans la lignée de Appeler Nord 777 de Henri Hathaway ou plus récemment de la série The Wire. On sent la fatigue qui l'accable, le froid qui l'engourdit et on a peur pour et avec lui lorsqu'il lors de la célèbre poursuite du métro en voiture. Les gros plans sur ses pieds quand il appuie sur la pédale, sur le volant quand il tourne, ainsi que les vues prises depuis l'avant de la voiture, nous plongent complètement dans le véhicule.

Ainsi, Friedkin confirme mon intérêt nouveau pour sa filmographie. Le film criminel américain se veut être une plongée dans la réalité sociale de son temps. C'est chose faîte. Le film nous montre bien les difficultés des "flics", leur bureaucratie rigide et leur manque de moyens au contraire des réseaux criminels en apparence impossibles à démasquer. Kennedy est mort depuis moins d'une décennie et l'on sent que le rêve américain s'est effondré.

Ce festival fût réellement fascinant. J'ai déjà hâte d'être à l'année prochaine. La fin de la parenthèse cinématographique ramène aux inquiétude du présent et de l'avenir. D'ici là, il est temps de retrouver des nuits plus complètes. Le cerveau a bien été sollicité et mérite maintenant de se reposer pour mieux assimiler ce qu'il a découvert. Sur ce, je passe les crédits de fin et coupe la projection.

En tout cas, jusqu'à la prochaine séance de cinéma. La caméra de la salle s'arrête, mais celle du studio continue de tourner après tout. D'autres surprises nous attendent.

Restez curieux.

Crédit photographique : © 1971 Twentieth Century Fox

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