Splitscreen-review Image de P T U de Johnnie To

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Déambulation Lumière : J7

Publié par - 22 octobre 2017

Catégorie(s): Cinéma, Expositions / Festivals

Pour qui a grandi dans les années 80/90, Johnnie To incarne par excellence le cinéaste d’un Hong-Kong débridé, fou et tapageur. Un temps où le cinéma d’action en provenance d'Asie occupait une place de choix au sein des vidéoclubs. C'était aussi un temps où les festivals internationaux récompensaient régulièrement le savoir-faire explosif des cinéastes chinois, hongkongais et autres taïwanais qui produisaient des polars effrénés mais surtout inventifs et réalisés avec soin. Une époque révolue quand on voit les films récents de To (Office, Drug War…), où l’on ne s’ennuie certes pas, mais où l’artisan fait désormais place à l’industriel.

C’est avec un grand plaisir, grâce à la carte blanche accordée à Wong Kar-Wai, proprement excellente, que l’on peut redécouvrir en salle cette fresque dingue en Scope que représente P.T.U (Police Tactical Unit). Tout comme les séances matinales, les séances tardives (22h) ne semblent pas passionner les invités puisque cette fois c’est un employé du cinéma Comoedia qui est venu « présenter » le film… Bien grand mot puisqu’il situe le film dans une période où Hong-Kong est encore britannique alors que ce n’était plus le cas depuis un bon moment (P.T.U sort en 2003, rétrocession de la Région en 1997)…

Quoi qu’il en soit, la séance fut l’occasion de se reprendre un magistral uppercut dans les gencives. Tout se passe le temps d'une unique nuit, où un événement apparemment anodin amènera différents corps policiers rivaux à se mêler aux Triades locales, rivales entre elles également. Dès la séquence d’ouverture, Johnnie To donne le ton avec ces dix minutes où tous les éléments de l’intrigue se croisent et se répondent par la virtuosité du scénario et de la mise en scène. Chaque petite pièce du puzzle se place au fur et à mesure dans un Hong-Kong nocturne, véritable terrain de jeu pour gangs rappelant The Warriors de Walter Hill, jusqu'à ce grand final digne d’un western spaghetti.

Le scope, utilisé sur toute son étendue par les comédiens (tous d’excellents habitués des productions Milkyway) lors de plans larges jouissifs, nous plonge dans cet univers si particulier propre à Johnnie To. Un Hong-Kong sombre, chaotique, presque inhabité où chaque élément de décor est travaillé par un jeu de lumière,  comme cette ombre d'un ventilateur au plafond se reflétant sur un mur en haut d'un escalier. Un travail de peaufinage et de méticulosité dans l’image qui ne se retrouve plus dans ces travaux actuels et, hélas, dans la majorité de la production hong-kongaise contemporaine. Il n’y a qu’à voir quelques images des nombreuses suites de P.T.U (5 ! – toutes à gros budgets et produites par To) pour s’en rendre compte.

Et si le Festival Lumière utilise pour sa communication des thèmes musicaux issus de la filmographie d’Eastwood depuis sept ans, on peut esquisser un large sourire en les imaginant réutiliser les morceaux de Raymond Wong, compositeur attitré du metteur en scène, pour les prochaines éditions. Car si certains titres, comme l’outro à base de guitares pénétrantes et lancinantes, fonctionnent à merveille, d’autres utilisant des basses lourdes plutôt groovy sur des séquences tendues d'infiltration sont un bel exemple de contre-emploi audio/visuel. On apprécie ou on en rit, à l’image de tout le reste de la filmographie très colorée de Johnnie To.

Crédit photographique : Copyright Pathé Distribution

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