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Wind River

Publié par - 24 septembre 2017

Catégorie(s): Cinéma, Critiques

Wind river, l’homme face à sa nature.

Le sempiternel rapport de l’homme face à la sauvage nature n’en a pas fini avec le spectateur. Cela se vérifie par une résurgence de la présence du Western dans le cinéma contemporain et donc par la  recrudescence de films affiliés directement au genre comme c'est le cas pour Wind River. Film qui dès le premier plan sur les titanesques montagnes rocheuses rappelle ces paysages de Westerns traversés par une personne, minuscule et écrasée par la Nature. Et pourtant, dès le second plan, la caméra portée et  bringuebalante questionne l'impression première en incluant dans le canevas filmique une esthétique plus proche du thriller contemporain. Deux genres typiquement américains, unis dans une même narration.

Wind river se rattache au western par l'omniprésence de cette toute puissance de la nature sauvage que l’on oublie parfois (trop) de nos jours sur un territoire américain fait de culture et de domination anthropocentrique. Mais, à l’instar des grands parcs naturels, il reste les réserves indiennes dont le territoire est autonome, et pratiquement immaculé. Le « West » est moins présent que le « wild », dont les dangers permanents se manifestent sous plusieurs formes : le froid hivernal du Wyoming, les prédateurs (loups, pumas…) et les hommes sans foi ni lois qui y vivent.

C'est d'ailleurs ces personnages qui introduisent un autre aspect du film. Une dimension plus sociale, plus intimiste, qui présente une triste réalité mise en emphase par la mention « inspiré de faits réels » au début du film : la condition des peuples amérindiens dans l’Amérique contemporaine. Pauvreté, alcoolisme et drogues sont le quotidien de beaucoup d’entre eux et les déterminent à une finalité aussi violente que tragique.  On entre alors dans une atmosphère plus proche du film criminel américain et de sa littérature « hard boiled ». Des histoires présentant un environnement à la faune corrompue et désabusée à laquelle doit faire face un imparfait « private ». Nous ne sommes pas si éloignés d'un récit digne d'un Raymond Chandler mis en scène par John Huston.

C’est dans cet environnement "hybride" que la « pied tendre » Jane Banner (Elizabeth Olsen), doit mener l’enquête sur la mort d’une jeune native retrouvée dans une étendue désertique de Wind River, une réserve indienne. L'agent Banner comprendra très vite que c’est un monde « sauvage », mystérieux, qui relève de l’inconnu, en somme, un univers qu’elle ne connait pas. Elle ne pourra avancer dans son enquête qu’avec l’aide de Cory Lambert (Jeremy Renner), une sorte de John Wayne des temps modernes qui cristallise les tendances et évolutions historiques survenues dans le schéma du western. Cory Lambert est à la fois hanté et poussé par des vertus ou caractéristiques qui rappellent le western dit « classique ». On notera d'ailleurs que, cette fois, la prisonnière du désert (neigeux) sera retrouvée dès la première demi-heure. C'est d'ailleurs à ce point du récit que la quête mute quelque peu vers le film criminel. La recherche se focalise alors sur la découverte du coupable et Wind River concentre son propos sur l'exploration des potentielles motivations de l'assassin. Les protagonistes principaux sont ainsi habités par la volonté de percer le mystère de ce qui pousse un individu à commettre des actes d'une froideur impitoyable, nous rappelant les tonalités de l'inexplicable que pouvaient développer des personnages de westerns dit « crépusculaires ».

Le pur blanc de cette neige maculé de sang d’innocents nous présente un film à plusieurs registres formels. Wind River navigue entre scènes calmes et fortes dans la déclinaison des rapports entretenus par les personnages et des scènes d’une violence viscérale et surprenante. Construit intelligemment, Wind River, séduit par cette diversité de genre qui arrive à trouver une synergie, dans une tragédie hélas trop réelle, comme nous l’indique l’épilogue dont la durée est trop longue pour suggérer une résolution immédiate. Elle est là, et sa fin en reste indéterminée.

Crédit photographique : © 2017 The Weinstein Company. All Rights Reserved

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