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Les invités du festival J6

Publié par - 21 octobre 2017

Catégorie(s): Cinéma, Expositions / Festivals

William Friedkin, 82 ans, est arrivé sur la scène de la Comédie Odéon prêt à en découdre avec son interlocuteur. On s'attend presque à un match de boxe, droit dans son blouson en cuir, il en veut. Dès les premiers échanges, il lance au modérateur, Samuel Blumenfeld : "I told you not to give me soft ball questions", "Je t'ai dit que tu pouvais y aller plus franchement avec les questions". En maître du divertissement, il découpe ses anecdotes en séquences. Il veut transmettre des émotions, ajoute méticuleusement des détails, peu importe s'ils sont vrais. Il fait de la mise en scène par sa gestuelle, travaille son timing lorsqu'il révèle des éléments, comme dans une intrigue. Disponible sur le site du festival, le récit est passionnant, à écouter presque comme un feuilleton radiophonique.

Le cinéma s'articule autour de 3 films majeurs pour lui : Naissance d’une nation, Citizen Kane, À bout de souffle. Il en retient de nombreux autre évidemment, mais pour lui ceux-ci participent à des tournants majeurs de l'histoire du cinéma. Godard, dans ce trio, a peut-être eu les oreilles qui sifflaient, quand il fut réduit à n'être qu'un "style" précurseur.

Friedkin fait son entrée au cinéma par le documentaire, après un passage à la télévision. Le projet lui permet d'appréhender les interactions que le cinéma entretient avec la réalité, l'influence que son travail pourrait avoir sur la vie des autres. Dans le cas extrême de The People vs. Paul Crump, sur un détenu condamné à à la chaise électrique, il participera à l'annulation de la sentence prononcée à l'encontre d'un homme condamné 9 ans auparavant. Pour Friedkin c'est un exemple saisissant du "pouvoir du cinéma" et l'expérience sera déterminante dans sa carrière.

 

Le style documentaire nourrira chacun de ses films. Pour lui, l'expérience du spectateur de fiction ne doit pas être déconnectée de la réalité. French Connection, L'exorciste, La Chasse, les actions mises en place dans ces films sont toujours basées sur un travail lourdement documenté dans le but de donner aux interactions entre les personnages une authenticité qui excède les limites du simple réalisme.

 

Pour la réussite de sa carrière, il remercie en partie "les dieux du cinéma" qui lui sont venus en aide. Notamment sur French Connection dont le casting initial ne comportait ni Gene Hackman, ni Fernando Rey. Aujourd'hui il n'y a aucun doute qu'ils ont participé pleinement au succès du film.

Et la discussion glisse ainsi sur Dieu, tout court. En fait, à travers L'exorciste, la question qui est posée à William Friedkin est "Croyez-vous au Diable ?". Il ne se prononcera pas sur la question de la croyance à proprement parlé. Mais il évoque d'une part son respect pour les enseignements religieux, au delà de tout prosélytisme. Et par dessus tout, il estime qu'il ne peut pas y avoir de place pour le scepticisme chez un réalisateur. Il n'imagine pas un metteur en scène autrement qu'en l'imaginant "croyant de tous les possibles". C'est donc en totale ouverture sur l'inconnu, en "croyant" traduit du mot qu'il utilise "believer" , qu'il réalise L'exorciste sorti en 1973 et le reste de son œuvre.

 

En 2017, son dernier film, dont la date de sortie n'est pas connue, est un documentaire sur l’exorcisme : The Devil and Father Amorth. Sa rencontre avec l'exorciste du Vatican lors d'un séjour à Rome le replonge dans ce phénomène auquel il n'imaginait jamais revenir.

En nous quittant, il rend un hommage sincère au public de ses films, et remercie le Festival Lumière d'être résolument tourner vers les spectateurs.

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